Vous présidez l’association “Prolave”.
Quelles sont ses missions ?
Il s’agit d’une association de professionnels qui travaillent la lave sous toutes ses formes. Il peut s’agir de tailleurs de pierre, de graveurs, de sculpteurs et beaucoup d’émailleurs ou d’émailleuses ; cette profession étant plutôt féminine. “Prolave” s’est constituée il y a une vingtaine d’années pour offrir de la visibilité à ces métiers et permettre à ces artistes et artisans de montrer leur travail. Leurs œuvres sont extrêmement variées. Et finalement, cette mise en commun est très valorisante pour les adhérents. Nous avons une galerie d’exposition à la Maison de l’Artisanat à Volvic (1).
Quelles sont les qualités de la pierre de lave ?
« C’est difficile de les énumérer ! Elle les a toutes… (Il rit) D’abord, ce matériau est exceptionnel car il est quasiment indestructible. Regardez la cathédrale de Clermont-Ferrand : aujourd’hui encore, cet édifice est comme neuf. Les coups d’outils sont encore visibles. La pierre de lave possède une autre qualité : elle se travaille très bien. Et comme elle ne gèle pas, on a compris qu’elle était idéale pour construire des fontaines. Bref, c’est un matériau universel, avec lequel on peut tout faire. Il faut savoir que la pierre de lave est apparue tardivement dans l’histoire de l’architecture. Les Romains avaient de gros besoins, mais ils ne l’avaient pas encore découverte. Selon moi, on l’utilise depuis la fin du 12ème siècle. Mais c’est une hypothèse personnelle !. »
Malgré ses qualités, le matériau semble un peu passé de mode…
Il est vrai que ce n’est plus un matériau générique du bâtiment. L’activité funéraire s’est aussi beaucoup réduite. Grosso modo, son utilisation se résume au secteur de la restauration de patrimoine. Mais il reste encore quelques activités industrielles avec de belles entreprises sur le territoire. Sans compter l’émaillage, bien sûr…
Pourquoi avoir choisi le métier de sculpteur ?
La restauration de patrimoine m’attire depuis toujours. Pour moi, le bâti ancien est très exotique, car il dresse des ponts avec des populations qui ne vivaient pas comme nous, qui ont généré des formes d’habitation et des manières de vivre différentes. Connaître cette histoire permet de voyager dans le passé. Désormais, ce patrimoine s’offre aux yeux de tous. Au fil du temps, il est devenu collectif. D’où l’importance de le restaurer, de le maintenir et de le valoriser. Mon parcours ? J’ai d’abord travaillé dans l’archéologie et l’histoire de l’art. Ensuite, j’ai appris le métier. J’ai fait mes études à l’école de Volvic (l’IMAPEC, NDLR), qui fêtera son bicentenaire l’année prochaine (2).
Votre travail va traverser les siècles…
Bien sûr. Je ne le dis pas, mais c’est bien la réalité… Je connais ma névrose (il sourit.) Je suis comme l’escargot : je laisse une trace. Se dire que ce travail ne bougera pas, c’est formidable. Cela me donne des frissons.
Vous avez plusieurs cordes à votre arc…
Je partage mon temps entre deux activités. La première, c’est la restauration de patrimoine. Cela nécessite de travailler, réparer, restaurer, faire des prothèses. Ce travail ne laisse aucune place à l’imagination. Il faut être totalement investi mais totalement invisible. Ensuite, j’ai une activité plus créative. Je cherche alors à créer un lien ou une connivence avec le “regardeur”. J’essaie de faire en sorte qu’il se pose des questions, qu’il ait envie de comprendre des choses ou d’imaginer des histoires. Sculpteur, c’est un métier de brute permettant de réaliser des choses délicates. Un métier qui nécessite forcément une confrontation avec la matière.
(1) place de la Grande Fontaine, 63530 Volvic
(2) Institut des Métiers d’Art de la Pierre et de la Construction. www.tracesdepierre.com